2025

Le télescope spatial James Webb prévoit un ciel partiellement nuageux sur la Neptune ultra-chaude LTT 9779 b

Illustration de LTT 9779 b, la seule Neptune ultra-chaude connue. Crédit photo : Benoit Gougeon ; Université de Montréal
Illustration de LTT 9779 b, la seule Neptune ultra-chaude connue. Crédit photo : Benoit Gougeon ; Université de Montréal

Montréal, Canada – Une équipe de chercheurs dirigée par Louis-Philippe Coulombe, étudiant au doctorat de l’Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes (IREx) de l’Université de Montréal, a utilisé le télescope spatial James Webb (JWST) pour explorer l’atmosphère exotique de LTT 9779 b, une rare « Neptune ultra-chaude ». Les résultats, qui seront publiés le 25 février dans une nouvelle étude dans Nature Astronomy, offrent de nouvelles perspectives sur les conditions météorologiques extrêmes et les propriétés atmosphériques de cette exoplanète fascinante.

Un laboratoire unique pour les conditions météorologiques extraterrestres

Louis-Philippe Coulombe, auteur principal de cette étude. Cette photo a été prise au lac Tasman en Nouvelle-Zélande. Dans ses temps libres, Louis-Philippe aime faire de la randonnée et de la photographie de paysage. Crédit photo : Courtesy.

Orbitant autour de son étoile hôte en moins d’une journée, LTT 9779 b est soumise à des températures brûlantes atteignant près de 2 000 °C sur son côté jour. La planète est verrouillée par la marée (comme la Lune de la Terre), ce qui signifie qu’un côté fait constamment face à son étoile tandis que l’autre reste dans l’obscurité perpétuelle. Malgré ces conditions extrêmes, l’équipe de M. Coulombe a découvert que l’hémisphère ouest de la planète, plus froid, abritait des nuages réfléchissants, créant un contraste saisissant avec l’hémisphère est, plus chaud. « Cette planète constitue un laboratoire unique pour comprendre comment les nuages et le transport de chaleur interagissent dans les atmosphères des mondes fortement irradiés », explique M. Coulombe.

L’analyse de l’équipe, réalisée à l’aide du JWST, a mis en évidence une asymétrie dans la réflectivité de la planète du côté du jour. L’équipe a proposé que la distribution non uniforme de la chaleur et des nuages soit due à des vents puissants qui transportent la chaleur autour de la planète. Ces résultats permettent d’affiner les modèles décrivant le transport de la chaleur autour d’une planète et la formation des nuages dans l’atmosphère des exoplanètes, ce qui contribue à combler le fossé entre la théorie et l’observation.

Cartographie de l’atmosphère d’une Neptune ultra-chaude

L’équipe de chercheurs a étudié l’atmosphère en détail en analysant à la fois la chaleur émise par la planète et la lumière qu’elle réfléchit de son étoile. Pour obtenir une image plus précise, ils ont observé la planète à plusieurs endroits de son orbite et ont analysé ses propriétés à chaque phase. Ils ont découvert des nuages constitués de matériaux tels que des minéraux silicatés, qui se forment sur le côté ouest de la planète, légèrement plus froid. Ces nuages réfléchissants expliquent pourquoi cette planète est si brillante dans les longueurs d’onde visibles, car elle renvoie une grande partie de la lumière de l’étoile.

En combinant cette lumière réfléchie avec les émissions de chaleur, l’équipe a pu créer un modèle détaillé de l’atmosphère de la planète. Leurs résultats révèlent un équilibre délicat entre la chaleur intense de l’étoile et la capacité de la planète à redistribuer l’énergie. L’étude a également permis de détecter de la vapeur d’eau dans l’atmosphère, ce qui fournit des indices importants sur la composition de la planète et les processus qui régissent son environnement extrême.

« En modélisant en détail l’atmosphère de LTT 9779 b, nous commençons à découvrir les processus à l’origine de ses conditions météorologiques extraterrestres », explique le professeur Björn Benneke, coauteur de l’étude et conseiller scientifique de M. Coulombe.

Une étude pionnière avec le JWST

Illustration de LTT 9779 b, la seule Neptune ultra-chaude connue. Cette planète orbite si près de son étoile que son atmosphère est brûlante. Elle brille de sa propre chaleur tout en réfléchissant la lumière de l’étoile. Comme elle est verrouillée par la marée, c’est-à-dire qu’elle présente toujours le même côté à son étoile, une moitié est en permanence éclairée par la lumière du jour, tandis que l’autre reste dans l’obscurité. Les nouvelles observations du JWST avec NIRISS révèlent une atmosphère dynamique : des vents puissants balaient la planète, façonnant des nuages minéraux qui se condensent en un arc blanc et brillant sur le côté ouest du côté jour, légèrement plus froid. En se déplaçant vers l’est, ces nuages s’évaporent sous l’effet de la chaleur intense, laissant un ciel dégagé sur le côté est de la planète. Crédit photo : Benoit Gougeon ; Université de Montréal

Le JWST a une fois de plus démontré son incroyable puissance en permettant aux scientifiques d’étudier l’atmosphère de LTT 9779 b dans des détails sans précédent. Cette étude a fait appel à l’instrument canadien du JWST, Near Infrared Imager and Slitless Spectrograph (NIRISS), qui a observé la planète pendant près de 22 heures. Les données ont capturé l’orbite complète de la planète autour de son étoile, y compris deux éclipses secondaires (lorsque la planète passe derrière son étoile) et un transit primaire (lorsque la planète passe devant son étoile).

Pour une exoplanète comme LTT 9779 b, qui est verrouillée par son étoile, la quantité et le type de lumière que nous observons changent au fur et à mesure de la rotation de la planète, nous montrant différentes parties de sa surface. Le côté jour réfléchit et émet plus de lumière en raison d’un chauffage intense, tandis que le côté nuit, plus froid, émet moins de lumière. En capturant des spectres à différentes phases, les chercheurs peuvent cartographier les variations de température, de composition et même de couverture nuageuse à la surface de la planète.

Michael Radica, ancien doctorant à l’UdeM et aujourd’hui chercheur postdoctoral à l’université de Chicago, est le deuxième auteur de cette étude. Plus tôt cette année, le Dr Radica a publié une analyse détaillée du spectre lumineux de la planète pendant son transit. « Il est remarquable que les deux types d’analyse donnent une image aussi claire et cohérente de l’atmosphère de la planète », a-t-il noté.

Les recherches ont été menées dans le cadre du programme NEAT (NIRISS Exploration of Atmospheric Diversity of Transiting Exoplanets) Guaranteed Time Observation, dirigé par le professeur David Lafrenière de l’IREx.

L’étude souligne l’importance de la capacité du JWST à observer les exoplanètes dans une large gamme de longueurs d’onde, ce qui permet aux scientifiques de démêler les contributions de la lumière réfléchie et de l’émission thermique. « C’est exactement le type de travaux révolutionnaires pour lesquels le JWST a été conçu », déclare David Lafrenière.

Implications pour la science des exoplanètes

LTT 9779 b se trouve dans le « désert de Neptune chaud », une catégorie de planètes dont l’existence est exceptionnellement rare. Alors que les planètes géantes en orbite très proche de leur étoile hôte – souvent appelées « Jupiters chauds » – sont couramment détectées à l’aide des méthodes actuelles de recherche d’exoplanètes, les Neptunes ultra-chauds comme LTT 9779 b restent remarquablement rares.

« Trouver une planète de cette taille si près de son étoile hôte, c’est comme trouver une boule de neige qui n’a pas fondu dans un incendie », déclare M. Coulombe. « C’est un témoignage de la diversité des systèmes planétaires et une fenêtre sur la façon dont les planètes évoluent dans des conditions extrêmes.

Ce système planétaire rare continue de défier les scientifiques dans leur compréhension de la formation, de la migration et de l’endurance des planètes face aux forces stellaires incessantes. Les nuages réfléchissants et la forte métallicité de la planète pourraient nous éclairer sur l’évolution des atmosphères dans des environnements extrêmes. LTT 9779 b est un laboratoire remarquable pour l’exploration de ces questions, offrant un aperçu des processus plus larges qui façonnent l’architecture des systèmes planétaires à travers la galaxie.

« Ces résultats nous donnent une nouvelle perspective pour comprendre la dynamique atmosphérique sur les petites géantes gazeuses », déclare M. Coulombe. « Ce n’est que le début de ce que le JWST va nous révéler sur ces mondes fascinants ».

 

À propos de l’article

Cette recherche fait partie du programme NEAT Guaranteed Time Observations, dirigé par le Prof. David Lafrenière. L’article complet, intitulé Highly-reflective clouds on the western dayside of an exo-Neptune identified with phase-resolved reflected-light and thermal-emission spectroscopy, publié le 25 février 2025 dans Nature Astronomy, est disponible à l’adresse suivante : https://www.nature.com/articles/s41550-025-02488-9.

Les auteurs remercient l’Agence spatiale canadienne pour son soutien financier à cette étude.

 

Contacts scientifiques :

Louis-Philippe Coulombe

Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes

Université de Montréal

Étudiant au doctorat

louis-philippe.coulombe@umontreal.ca 

 

Prof. Björn Benneke

Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes

Université de Montréal

bjorn.benneke@umontreal.ca 

 

Contact médias :

Heidi White

Université de Montréal

Scientifique chargée des communications sur le JWST – Agence spatiale canadienne

heidi.white@umontreal.ca