2025

Près de 300 heures avec le télescope Webb pour les astronomes de l’IREx!

Lisa Dang, Dhvani Doshi, Michael Radica, Antoine Darveau-Bernier, Joost Wardenier et Caroline Piaulet-G. mènent des programmes qui ont été sélectionnés au Cycle 4.
Lisa Dang, Dhvani Doshi, Michael Radica, Antoine Darveau-Bernier, Joost Wardenier et Caroline Piaulet-G. mènent des programmes qui ont été sélectionnés au Cycle 4.

Depuis le début de ses opérations en 2022, le télescope spatial James Webb (JWST) a permis des avancées scientifiques majeures dans le domaine des exoplanètes, comme la détection de gaz carbonique dans l’atmosphère de la jupiter chaude WASP-39 b ou l’étude de l’exoplanète Trappist-1 b. Cependant, il n’est pas donné à tout le monde d’observer avec le JWST ! Chaque année, l’équipe du télescope offre à la communauté internationale l’opportunité de proposer des programmes d’observation plus ou moins ambitieux à propos d’une large gamme de questions scientifiques. Ensuite, un comité composé d’astrophysiciennes et d’astrophysiciens évalue les propositions et choisit les lauréats. La compétition est féroce : en général, une seule proposition sur neuf se voit attribuer du temps d’observation.

Le 11 mars dernier, le Space Telescope Science Institute (STScI) a révélé les résultats pour le cycle 4. Au total, sur les 2346 programmes proposés, 274 ont été retenus pour cette quatrième année d’observation de JWST, qui s’étalera entre juillet 2025 et juin 2026, pour un total de 8500 heures d’observation. Comme pour les précédents cycles, le Canada a obtenu une importante part de ce temps d’observation, avec 11 programmes retenus menés par des chercheurs et chercheuses canadiens, pour un total de 10% du temps d’observation!

L’équipe de l’IREx, forte d’une expertise unique acquise au fil des cycles précédents, notamment grâce à ses programmes d’observations en « temps garantis » liés à la contribution canadienne à la construction du télescope, a obtenu un record de 165 heures d’observation. En prime, deux jeunes chercheurs récemment diplômés de l’Université de Montréal ont vu leurs projets sélectionnés, cumulant à eux deux un total de 133 heures!

Voici les programmes menés par des membres de notre équipe qui ont été sélectionnés:

Sonder les mondes infernaux

Lisa Dang. Photo fournie par elle-même.

Chercheuse principale (PI): Lisa Dang, chercheuse postdoctorale à l’IREx/UdeM
Co-chercheurs principaux (Co-PI) : N/A
Co-chercheur.se.s (Co-I)
: Nicolas Cowan, Mahesh Herath, Romain Allart, Joost Wardernier, Giang Nguyen de l’IREx et 28 co-chercheur.ses.s de partout dans le monde
Temps obtenu: 100.5 heures avec l’instrument MIRI, en mode spectroscopie à basse résolution

Les planètes de lave, des planètes telluriques situées très près de leur étoile, offrent une occasion unique d’en apprendre davantage sur les exoplanètes rocheuses et leur intérieur. Chauffées à des températures extrêmement élevées, ces planètes présentent une surface de magma en fusion, exposée en permanence et en constante évaporation.

Lisa Dang et son équipe proposent d’étudier cinq de ces mondes en fusion en observant leur lumière à l’aide de l’instrument MIRI, qui capte le rayonnement dans l’infrarouge moyen. En suivant l’évolution de la lumière de ces planètes tout au long de leur orbite autour de leur étoile, ils pourront obtenir ce qu’on appelle des « courbes de phase ». Cela consiste à mesurer comment la lumière et la chaleur émises par la planète changent au fil du temps, ce qui permet de cartographier leur atmosphère et de mieux comprendre la composition de leur intérieur.

Plus d’information sur le programme sur le site de STScI : GO 8864 : Sonder les mondes infernaux : les planètes de lave comme capsules temporelles de l’évolution thermique (Surveying Hellish Worlds: Lava Planets as Time Capsules of Thermal Evolution).

Explorer les éruptions stellaires des petites étoiles

Dhvani Doshi. Photo fournie par elle-même.

Chercheuse principale (PI): Dhvani Doshi, étudiante au doctorat à l’IREx/McGill
Co-chercheurs principaux (Co-PI) : N/A
Co-chercheur.se.s (Co-I)
: Nicolas Cowan, Étienne Artigau, René Doyon, Olivia Lim et 2 co-chercheurs des États-Unis
Temps obtenu: 47,6 heures avec le mode de spectroscopie sans fente sur un seul objet de NIRISS

Les étoiles de faible masse, appelées naines M, sont souvent très actives et présentent des éruptions stellaires puissantes. Ces événements peuvent compliquer la détection et l’étude des exoplanètes qui gravitent autour de ces étoiles.

Dhvani Doshi et son équipe proposent d’étudier cinq de ces étoiles actives pendant 5 à 10 heures chacune, en utilisant l’instrument NIRISS. Leur objectif est de créer une bibliothèque complète d’éruptions stellaires dans le proche infrarouge, avec comme objectif d’enregistrer jusqu’à 400 événements. À ce jour, peu d’observations en proche infrarouge ont été publiées, bien que ces éruptions jouent un rôle crucial dans l’étude des exoplanètes, notamment lorsqu’elles passent devant ou derrière leur étoile, ou lorsqu’on analyse leur lumière pendant leur orbite. Ce projet permettra de mieux comprendre comment ces éruptions influencent la lumière des étoiles et d’approfondir nos connaissances sur les phénomènes stellaires.

Plus d’information sur le programme sur le site de STScI : GO 7068 : Surveiller les manigances stellaires : L’exploration des éruptions des naines M à la recherche d’informations sur les exoplanètes (Surveying Stellar Shenanigans: Exploring M dwarf Flares for Exoplanetary Insights)

La jupiter ultra-chaude KELT-20b cartographiée

Antoine Darveau-Bernier et Joost Wardenier. Photos fournies par eux-mêmes.

Chercheur principale (PI): Joost Wardernier, chercheur postdoctoral à l’IREx/UdeM
Co-chercheurs principaux (Co-PI) : Antoine Darveau-Bernier (ancien membre de l’IREx/UdeM, aujourd’hui à Environnement Canada) et Mark Hammond de l’Université d’Oxford
Co-chercheur.se.s (Co-I)
: Lisa Dang, Nicolas Cowan, David Lafrenière, Louis-Philippe Coulombe et Loïc Albert; les anciens membres de l’IREx Taylor Bell (STScI), Jake Taylor (Université d’Oxford) et Anne Boucher (Environnement Canada); les stagiaires d’été Ying (Zoe) Shu, Alexandra Rochon, et 5 co-chercheurs européens.
Temps obtenu: 16,7 heures avec l’instrument NIRSpec en mode observation d’objets lumineux

Les « jupiters ultra-chaudes » sont des exoplanètes géantes très proches de leur étoile. En raison d’un phénomène appelé « verrouillage par effet de marées », elles ont un « côté jour », qui fait toujours face à l’étoile, et un côté « nuit » qui est plongé dans l’obscurité perpétuelle. Cela crée des contrastes de température extrêmes entre le jour et la nuit, ainsi que des vents très puissants. Avec l’arrivée de JWST, les observations de ces planètes ont atteint un niveau de détail inégalé. Pendant longtemps, les observations des jupiters (ultra-)chaudes ont été interprétées à l’aide de modèles atmosphériques en 1D, qui supposent que la température et la composition de la planète varient uniquement en fonction de l’altitude. Cependant, pour interpréter correctement les données du JWST, il est nécessaire de prendre en compte la structure complète en 3D de la planète.

L’équipe dirigée par Joost Wardenier, Antoine Darveau-Bernier et leur collègue Mark Hammond utilisera l’instrument NIRSpec du JWST pour observer la jupiter ultra-chaude KELT-20 b. En utilisant une technique connue sous le nom de « cartographie d’éclipse », qui consiste à prendre des « clichés » de la planète lorsqu’elle passe derrière son étoile (pendant son éclipse), ils espèrent créer la carte de température en 3D la plus précise jamais réalisée pour une exoplanète. Cela fournira des informations précieuses sur la redistribution de la chaleur dans l’atmosphère des jupiters ultra-chaudes, et aidera à affiner une nouvelle génération de modèles des jupiters ultra-chaudes.

Plus d’information sur le programme sur le site de STScI : GO6978: The dayside of the coolest ultra-hot Jupiter, KELT-20b, resolved with eclipse mapping).

 

Les deux programmes suivants sont soutenus par des anciens membres :

Révéler la nature des super-puffs

Michael Radica et Caroline Piaulet-G. Photos fournies par eux-mêmes.

Chercheur principal (PI): Michael Radica (Université de Chicago, diplômé de l’IREx/UdeM)
Co-chercheuse principale (Co-PI) : Caroline Piaulet-G. (Université de Chicago, diplômé de l’IREx/UdeM)
Co-chercheur.se.s (Co-I)
: 6 co-chercheurs des États-Unis
Temps obtenu: 94,6h avec l’instrument MIRI, en mode spectroscopie à basse résolution, NIRSpec en mode observation d’objets lumineux et NIRISS en mode de spectroscopie sans fente

Les exoplanètes surnommées « super-puffs » sont des mondes qui ont une masse similaire à celle de Neptune, mais un rayon de l’ordre de celui de Saturne, ce qui les rend assez mystérieuses. Leur taille étonnamment grande est difficile à expliquer avec les modèles habituels de formation des planètes. Cela pourrait être dû à des températures internes très élevées ou par la présence de brouillard constitué de minuscules particules dans leur atmosphère, créées par des réactions chimiques sous l’effet de la lumière de leur étoile.

Michael Radica et Caroline Piaulet-G. anciens étudiants de l’IREx désormais chercheurs à l’Université de Chicago, veulent avec leur équipe étudier quatre de ces exoplanètes aux températures et masses variées : WASP-107 b, WASP-127 b, WASP-193 b, et TOI-1420 b. Ils utiliseront trois des instruments de JWST afin d’analyser la lumière qui traverse leur atmosphère dans toute une gamme de longueurs d’onde (couleurs). Cela permettra d’en apprendre plus sur la composition de l’atmosphère et les phénomènes physiques et chimiques qui expliquent leur grande taille et leur formation.

Plus d’information sur le programme sur le site de STScI : GO9101 : Révéler la nature des super-puffs : Une étude de spectroscopie panchromatique en transmission (Unveiling the Nature of Super-Puffs: A Panchromatic Transmission Spectroscopy Survey).

 

Révéler la chimie et la formation des exo-neptunes

Caroline Piaulet

Caroline Piaulet-G. Photo fournie par elle-même.

Chercheur principal (PI): Caroline Piaulet-G. (Université de Chicago, diplômé de l’IREx/UdeM)
Co-chercheurs principaux (Co-PI) : N/A
Co-chercheur.se.s (Co-I)
: Björn Benneke, Louis-Philippe Coulombe, Pierre-Alexis Roy, Romain Allart de l’IREx, nos anciens Stefan Pelletier (Observatoire du Genève) et Michael Radica (Université de Chicago) et 12 autres co-chercheurs des États-Unis et de l’Europe
Temps obtenu: 38h avec l’instrument MIRI, en mode spectroscopie à basse résolution, NIRSpec en mode observation d’objets lumineux et NIRISS en mode de spectroscopie sans fente

Parmi les exoplanètes connues, on en retrouve beaucoup qui ont des tailles et des masses similaires à Neptune. Ces « exo-neptunes » sont moins courantes que les planètes plus petites, mais beaucoup plus fréquentes que les géantes gazeuses très proches de leur étoiles (les fameuses jupiters chaudes, qui ont été tant étudiées). Elles sont importantes car elles peuvent nous aider à comprendre comment Neptune et Uranus se sont formées dans notre propre Système solaire. Cependant, étudier ces planètes est difficile en raison de la présence de nuages et de brouillard dans leur atmosphère.

Caroline Piaulet-G. et son équipe veulent étudier l’exo-neptune TOI-674 b, qui a une température d’environ 370°C. Grâce à trois des instruments du télescope JWST, ils analyseront la lumière de la planète dans différentes couleurs (longueurs d’onde) pour mieux comprendre son atmosphère. Ils chercheront à savoir quels types de nuages et de brouillards s’y trouvent, comment la chimie de l’atmosphère fonctionne, et s’il y a des signes de chaleur interne élevée, qui pourrait être causée par la friction entre la planète et son étoile. Ces observations permettront de mieux comprendre toutes les exo-neptunes et de mieux connaître leur formation et leur évolution.

Plus d’information sur le programme sur le site de STScI : GO9095 : Combiner la spectroscopie d’émission et de transmission pour révéler les aérosols, la chimie et la formation d’exo-neptune (Combining Emission and Transmission Spectroscopy to reveal Exo-Neptune Aerosols, Chemistry, and Formation).

 

De nombreux autres programmes du Cycle 4 du JWST seront soutenus par des chercheurs canadiens et de l’IREx en tant que co-chercheurs. Pour voir tous les programmes GO sélectionnés, consultez le site web de STScI.

Félicitations à tous les astronomes qui ont obtenu du temps, ainsi qu’à tous les astronomes qui ont soumis des demandes !

Le prochain appel pour des demandes de temps pour le Cycle 5 du programme GO du JWST est attendu en août 2025 avec une date limite de soumission qui sera sans doute à l’automne.